L’amour de la guerre

Dans l’adversité, chérissez vos ennemis.

Picasso – Guernica

La colère et la haine sont des moteurs de guerre, mais leur trop forte influence mène à l’erreur grossière. Leur juste équilibre est vital et décisif.

C’est en aimant son ennemi qu’on s’intéresse à lui. C’est ainsi qu’on le comprend.
Comment vit-il, que mange-t-il? Quelles sont ses valeurs? Quels sont ses us et coutumes? L’acte martial est similaire à la chasse: connaître et comprendre sa proie, pour la devancer.

La connaissance de votre ennemi vous apportera bien des choses bénéfiques dans le rapport de force.
Ainsi, cela vous permettra d’abord d’ajuster votre estime, pour ne pas le sous-estimer par exemple.
Egalement, vous connaitrez ainsi ce qui lui est cher, et ce qui lui importe peu. Vous connaitrez ses zones vitales, et celles qui ne le sont pas. Vous connaitrez ses points forts, et ses points faibles.

La connaissance de votre ennemi constitue un socle fondamental solide et nécessaire à l’élaboration d’un plan martial structuré et pragmatique.

Connaitre son ennemi apaise également la peur. La peur vient de la méconnaissance, de la trop grande possibilité de perdre le contrôle, de ne pas maîtriser les choses. Ruiner cette méconnaissance au profit de notions concrètes sur l’ennemi est le meilleur moyen d’annihiler la peur naturellement et par son propre fondement.

Banksy

L’amour lors de la guerre décontenance l’ennemi. Pourquoi l’attaqué développerait un amour, une passion, pour l’attaquant? Et inversement, dans quel monde l’attaquant deviendrait «  amoureux » de l’attaqué? Dans quelle configuration martiale? Dans quel contexte cela pourrait s’expliquer?

Ceci ressemble fort à une mauvaise histoire d’amour à l’eau de rose, contée par un écrivain un peu trop porté sur la bouteille. Cependant, vous trouverez ici l’une des mécaniques les plus dévastatrices de la pratique martiale.

Comme le rire et la peur, l’amour et la haine sont des sentiments très proches. Il n’y a qu’un pas entre les deux, et certaines personnes percevront de l’amour là où la haine s’est déjà déclarée pour d’autres. Et vice-versa.

Sun Tzu

Il s’agit également d’honneur et de principes. Comme le disait Sun-Tzu, la guerre est un art. Noble, il nécessite savoir, passion, temps et instinct pour être mené à bien.

Comme il s’agit d’un art, il n’est rien d’absolu.
Et comme il s’agit d’un art, il est subjectif.

Que vaut le Seigneur qui éviscère ses victimes, contre celui qui leur donne une chance d’apporter quelque chose à la société dont ils sont prisonniers?

A quoi ressemble ce prétendu chic Monsieur dans le métro, maintenant qu’il a clos cette joute verbale par des insultes proférées à son interlocuteur?

C’est à l’exact moment où notre adversaire est vaincu qu’il faudra lui faire preuve de noblesse; ni avant. Ni après.

L’adversaire vaincu, sentant cette main tendue, aura plusieurs choix face à celle-ci. C’est pourquoi l’amour de son adversaire ne transige en rien sur l’impeccabilité de l’intelligence investie dans le rapport.

On dit souvent en ce siècle d’entreprenariat, qu’il faut toujours gérer une affaire en bon père de famille. Pourquoi la guerre ne serait pas une affaire, avec ses griefs et ses mœurs, comme n’importe quelle autre affaire?

Comme disait la contre-culture US des 60’s (Viet-nâm)

« Faites l’amour, pas la guerre. »

Cliché, mais qui aurait pensé que les hippies étaient malgré eux experts en arts martiaux?

— Kaiser